Journal de Patagonie – Larmes et barbes à papa

Le 7 mars 2013 – De Santiago à Punta Arenas, ville portuaire du détroit de Magellan.

Punta Arenas

Punta Arenas

     Ces derniers jours à Santiago ont été teintés de nostalgie et d’un vilain mal du pays. Le premier, d’ailleurs, depuis mon départ de France il y a deux ans et demi. L’envie tenaillante de voir ma famille a occupé toutes mes pensées la semaine passée, rendant mon travail au journal assez pénible. Consciente que ces petits désagréments sont inévitables lorsque l’on vit à l’étranger, je tente de me consoler en me disant que ce voyage en Patagonie tombe à pic. Je vais pouvoir prendre l’air et me vider la tête loin de la ville, dans l’un de ces rares endroits sur terre où la nature a encore aujourd’hui tous ses droits.

Dans l’avion, je n’ai pas le courage de m’attaquer au plateau repas que m’amène l’hôtesse. Toujours contrariée, je me rabats sur le pain et le morceau de beurre. Une mauvaise idée, qui a eu l’avantage de me faire comprendre ce que Proust avait ressenti avec sa madeleine. Le souvenir de ma grand-mère bretonne me préparant mon goûter lors de ces longues journées d’été dans le Morbihan vient me nouer la gorge instantanément. Je ferme alors mes yeux plein de larmes en décidant que la meilleure chose à faire est de dormir le reste du voyage.

A l’aéroport de Punta Arenas, je récupère mon sac de randonnée qui, comme à son habitude, arrive sur le tapis roulant le dernier. Il est plein à craquer : sac de couchage, tapis de sol, chaussures de marche, barres de céréales, et quelques vêtements. Chargée comme une mule, je passe devant un grand pingouin en carton qui semble accueillir les voyageurs ayant décidé de s’aventurer vers cette grande ville australe. Des écrans indiquent des vols pour l’Antarctique, Ushuaïa et Puerto Williams. Je prends alors conscience  que je n’ai jamais été aussi proche du bout du monde.

Accompagnée de mes amis, je franchis les portes vitrées de l’aéroport international.  Malgré l’heure tardive, la lumière est encore étonnamment éblouissante et je comprends pourquoi il fait tout gris à Paris. Au bout du monde, le soleil brille de toutes ses forces.

Je me laisse également surprendre par le fond de l’air glacial du sud du Chili qui vient doucement effleurer mes joues. Mon corps, qui s’était finalement habitué à la chaleur étouffante de Santiago, se raidit au contact du froid. Il est un peu plus de 18 heures, le ciel s’est déjà drapé d’une couleur orangée et la mer au loin offre un spectacle rempli de sérénité. Ma peine instantanément oubliée, je ne peux m’empêcher de sourire à l’horizon, des larmes, de froid cette fois-ci, aux coins des yeux.

Nous sautons dans le premier taxi que nous trouvons afin de rejoindre le centre-ville. Mes amis qui se sont déjà rendus à Punta Arenas m’ont parlé d’une ville sans intérêt, qui ne mérite pas vraiment que l’on s’y arrête. Pourtant, le paysage qui défile par la fenêtre m’enchante déjà : des petites maisons de tôle aux couleurs vives devant l’eau du détroit de Magellan, des passants emmitouflés dans leurs pulls en laine et ces arbres en forme de barbe à papa, qui semblent avoir été taillés au rythme des tornades.

Un bus pour Puerto Natales nous attend mais j’aurai le temps d’arpenter les rues de la ville portuaire dans dix jours. Pour le moment il s’agit de rejoindre le plus rapidement possible le parc national Torres del Paine pour pouvoir démarrer le célèbre circuit « W », un trekking de quatre jours dans les Andes, au cœur d’une nature encore préservée.

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2 réponses à “Journal de Patagonie – Larmes et barbes à papa

  1. ça ye de retour , ;)
    On est un peu émeut de te savoir tristoune , mais tu as repris du poil de la bêtes. Mais comme on dis c’ est partir pour mieux revenir.
    Mais en tout cas je suis content de retrouver mes nouvelles hebdomadaire … ;)

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